Jean-Philippe Postel, L’Affaire Arnolfini 2016
Les Époux Arnolfini est le nom donné à une peinture sur bois (82,2 × 60 cm) du peintre primitif flamand Jan van Eyck datant de 1434, conservée à la National Gallery de Londres.
Après avoir lu deux livres sur la vie de peintres avec « Charlotte » de David Foenkinos il y a quelques temps et « Être ici est une splendeur » de Marie Darrieussecq je suis tombé sur celui-là qui parle d’un tableau plus que du peintre dont on ne connaît pas grand chose.
.-. Ce que l’on sait (wikirésumé)
• Diego de Guevara est le premier propriétaire connu du tableau.
• En 1516, le tableau appartient à Marguerite d’Autriche. « Un grand tableau qu’on appelle Hernoul-le-Fin avec sa femme »
• En 1524, il est cité dans un autre inventaire des possessions de Marguerite d’Autriche. Le personnage est nommé Arnoult fin.
• En 1558 il passe aux mains de Marie de Hongrie, qui l’emporte en Espagne.
• En 1568, un livre sur les antiquités flamandes affirme que le tableau aurait été acheté par Marie de Hongrie à un barbier de Bruges et le décrit comme un petit tableau d’un homme et d’une femme se tenant par la main et comme unis par la foi.
• En 1599, le voyageur allemand Jacob Cuelvis, visitant l’Alcázar royal de Madrid, y voit le tableau qu’il décrit ainsi : « Une image qui représente un homme et une jeune femme unissant leurs mains comme s’ils étaient en train de se faire une promesse de mariage ». Il y a beaucoup de choses écrites et aussi ceci : « Promittas facito, quid enim promittere laedit ? Pollicitis dives quilibet esse potest » (Voir que vous promettez, Pourquoi, quel mal peut-une promesse? Dans les promesses tout le monde peut être riche)
• En 1700 Il figure dans l’inventaire de la collection royale espagnole : « Une peinture sur bois avec deux portes qui se ferment, un cadre en bois doré et des vers d’Ovide inscrits sur le cadre de la peinture, qui montre une femme allemande enceinte, vêtue de vert, serrant la main d’un jeune homme ; ils semblent se marier de nuit, et les vers déclarent qu’ils se trompent l’un l’autre et les portes sont peintes en faux marbre: prix, seize doublons »
• En 1815 le tableau disparaît d’Espagne et tombe entre les mains du lieutenant-colonel écossais James Hay qui prétend l’avoir acheté à Bruxelles, où il se remettait de blessures subies durant la bataille de Waterloo. Certains historiens d’art pensent qu’il l’a obtenu comme butin de guerre lors de la bataille de Vitoria (1813), en Espagne, durant laquelle disparurent des œuvres d’art ayant appartenu à Joseph Bonaparte.
• En 1815, Toussaint-Bernard Émeric-David semble connaître le tableau, puisqu’il évoque, parmi d’autres œuvres de Van Eyck, « un jeune homme et une jeune femme allant se marier ».
• En 1816 le tableau est emporté par Hay en Grande Bretagne et est offert au prince régent George IV. Description: « un tableau dans un cadre doré, double portrait d’un homme et d’une femme joignant leurs mains, la femme habillée en vert, l’homme en noir avec un grand chapeau rond. Par Jean van Eyck, l’inventeur de la peinture à l’huile ».
• En 1841 Hay prête le tableau à la National Gallery.
• En 1842, la National Gallery achète le tableau pour 630 livres. Il y est depuis cette date.
.-. Sujet
Le tableau représenterait Giovanni Arnolfini, riche marchand toscan établi à Bruges (portant un pourpoint noir et une huque de velours violet doublée de fourrure), et son épouse Giovanna Cenami (portant une robe bleue, une huve blanche, un surcot vert bordé de fourrure grise, un petit chien aux pieds.
Selon Erwin Panofsky, il s’agirait du mariage des deux personnages, célébré en privé, et dont Van Eyck serait le témoin, l’autre témoin étant l’homme dans le miroir. La main gauche de la femme, posée sur un ventre rebondi, annoncerait qu’elle est déjà enceinte ce qui expliquerait le mariage en secret. Le tableau serait un document juridique attestant de ce mariage, d’où la signature au-dessus du miroir « Johannes de Eyck fuit hic 1434 » (Johannes de Eyck fut ici en 1434). Théorie aujourd’hui controversée.
Cette peinture est considérée comme une des œuvres majeures de l’artiste. Il s’agit de l’un des plus anciens portraits non hagiographiques (Religigieux) conservés. En outre, par son réalisme, la peinture livre de nombreux détails sur les conditions de vie matérielle de l’époque.
.-. Jean-Philippe Postel dans « L’Affaire Arnolfini » étudie le tableau et voit une histoire différente et bien étrange.
Dans le miroir, la question n’est pas « que voit-on ? » mais que manque-t-il ?
Et presque tous les détails ont alors une signification qui corrobore sa thèse.
• le patenôtre,
• Le miroir et de ses 10 médaillons.
• Ce qui est écrit : Johannes de eyck fuit hic. 1434.
• Les oranges, fruits exotiques de luxe, commanditaire riche,
• Les cerises sur l’arbre à l’extérieur,
• les cives de verre soufflé symbolisent le paradis,
• Le lustre porte une bougie allumée au-dessus de l’homme,
• Le petit chien au premier plan (fidélité conjugale?)
• Le lit conjugal aux tentures d’un rouge vif,
• Les patins, sandales d’extérieur
• Les mules rouges
.-. Giovanni Arnolfini, l’homme du tableau.
Il existe un portrait en buste de Giovanni Arnolfini peint en 1438 par van Eyck et conservé à la Gemäldegalerie de Berlin.
Giovanni, né à Lucques vers 1400, s’installa à Bruges vers 1421.
Vers 1423 il vendit au duc de Bourgogne une série de six tapisseries avec des scènes de Notre Dame pour un cadeau au pape.
En 1431, il devint conseiller aulique* de Philippe le Bon, puis chambellan et majordome de Charles le Téméraire.
Il fut anobli en 1462.
Il épousa Giovanna Cenami (morte en 1480 ou 1430) d’une famille de banquiers de Lucques installée à Paris.
Si elle est morte en 1430 le tableau ne peut pas représenter le mariage.
Si c’est sa femme qu’on voit sur le tableau?
Ce qui est sûr c’est qu’elle n’est pas enceinte. Dans un autre tableau (Tryptique de Dresde, panneau de droite: Catherine d’Alexandrie) Van Eyck représente une vierge avec le même aspect.
Je ne vais pas vous raconter la suite, ça gâcherait la Lecture…
* Aulique : Qui a rapport, qui appartient à la Cour, à l’entourage d’un souverain
J’ai réuni dans un album les détails dont Jean-Philippe Postel s’est servi pour son interprétation étonnante:
https://photos.app.goo.gl/j78T9C11PtX1tiqU8
Un tour d’horizon des œuvres de Jan Van Eyck:
https://www.aparences.net/ecoles/les-primitifs-flamands/jan-van-eyck/
http://bit.ly/ChristianLoverde
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